Il y a quelques jours, le conseil d’administration de l’office public Vallis Habitat a voté en faveur de sa fusion-absorption par le bailleur privé Grand Delta Habitat. Le Conseil Départemental de Vaucluse, propriétaire de Vallis Habitat, qui a initié cette privatisation abandonne ainsi un outil majeur dédié à l’aménagement du territoire et à la solidarité, deux compétences très importantes de la collectivité. Cette décision précipitée plonge les collaborateurs de Vallis Habitat dans l’incompréhension et la colère.
Vallis Habitat est le premier bailleur du département avec 16 000 logements, 37 000 locataires, 9 structures d’hébergement collectives, 304 collaborateurs dont 158 fonctionnaires. Il possède 46% du patrimoine social du Vaucluse. C’est un opérateur d’envergure qui rencontre des difficultés structurelles liées à son organisation mais dont les finances sont équilibrées et pourtant…
« On privatise le seul organisme public HLM du territoire »
Une décision historique
Et pourtant, tout a été réglé en 4 mois et en pleine période estivale.
À moins d’un blocage juridique de dernière minute, la privatisation du seul organisme public HLM du Vaucluse aura bien lieu. Cette décision a été initiée par Dominique Santoni, la Présidente du Département. Ce choix politique est loin d’être anodin, il marquera l’histoire de l’institution et en dit long sur les ambitions, la méthode et la politique que souhaite mener Dominique Santoni durant sa mandature.
André Castelli, élu d’opposition au Département ne comprend absolument pas cette décision « Nous avons le 5ème département le plus pauvre de France et on privatise le seul organisme public HLM du territoire. Le logement social est un outil essentiel de l’aménagement du territoire et des politiques de solidarité. Au moment où les populations les plus fragiles sortent du Covid et sont aujourd’hui frappées par la hausse considérable des prix, prendre cette décision est un désastre politique et social. »
« Cette privatisation interroge. Pourquoi a-t-elle été menée si vite ? »
Des salariés inquiets pour leur avenir
Les syndicats sont unanimes et s’inquiètent pour l’avenir des 304 collaborateurs, Laurence Falicon-Gendreau, secrétaire générale de FO précise « Il était tout à fait possible d’effectuer un rapprochement entre Vallis Habitat et Grand Delta Habitat via une Société de Coordination (SC), c’est une procédure qui existe pour les organismes HLM qui permet de mutualiser des moyens et des actions tout en conservant son autonomie. Cette option juridique avait été évoquée et n’a pas été retenue. Cette privatisation interroge. Pourquoi a-t-elle été menée si vite ? Sert-elle en priorité les intérêts de Grand Delta Habitat ? Dans tous les cas, nous sommes très inquiets de la disparition de l’opérateur public et de ses conséquences pour les 304 collaborateurs. »
Concernant le méthode, André Castelli regrette l’absence de débat « C’est bien simple, ce choix de privatisation n’a fait l’objet d’aucun débat au Conseil Départemental. Le seul échange que nous aurons entre les élus de la majorité et ceux de l’opposition est prévu lors du Conseil Départemental du 7 octobre, à la toute fin du processus. Vous trouvez ça normal ? »
Révélateur de la politique de Dominique Santoni
Choix stratégique contesté, décision précipitée, aucun débat démocratique, absence de visibilité pour les collaborateurs et les locataires, les syndicats dénoncent également l’inertie de certains élus. Cécile Helle, Maire d’Avignon, qui compte près de 14 000 logements sociaux dans sa ville n’a même pas répondu au courrier de sollicitation des syndicats.
Quant aux autres élus, le sénateur Lucien Stanzione et l’ex Député Souad Zitouni ont reçu les syndicats et ont tenté à leur niveau, de répondre à leurs préoccupations. S’agissant des élus au conseil d’administration de Vallis Habitat, Fabrice Martinez Tocabens a voté Contre la fusion-absorption tandis que l’ex socialiste, Jean-François Lovisolo a voté Pour.
Parmi les nombreuses compétences de la collectivité départementale, sa première vocation est d’agir en faveur de la promotion des solidarités et de la cohésion territoriale. C’est une mission essentielle et de nombreux élus en France placent le logement au centre de leur action sociale. On le voit depuis son élection, Dominique Santoni préfère agir dans le champ de l’attractivité territoriale, être sur le terrain économique plutôt que celui des solidarités, un domaine beaucoup plus compliqué.
Lâcher le logement social en période de crise est un acte politique, c’est un révélateur de son ambition à la tête du Département. Ce dossier de fusion-absorption restera un marqueur fort de sa politique et de sa personnalité.
Jamil Zéribi